À l’heure où le Traité sur la protection de la haute mer vient d’être ratifié par plus de soixante pays, les Éditions Sud Ouest publient un ouvrage qui tombe à point nommé : Atlantique, le grand livre de l’Océan, sous la direction d’Emmanuel de Fontainieu, directeur du Centre international de la mer à la Corderie Royale de Rochefort.
Un livre ample, vibrant, comme une houle qui ne cesse de surprendre. Conçu comme un chant choral de la mer, il rassemble des voix venues de tous horizons : Érik Orsenna, Olivier Poivre d’Arvor, Dominique Chevillon, Adrien Motel, Jean-Didier Urbain, et bien d’autres écrivains, navigateurs, journalistes, sociologues, peintres ou poètes.

La mer comme personnage
« Nous voulions faire de la mer un personnage », explique Emmanuel de Fontainieu lors de la présentation du livre à la Maison de la Nouvelle-Aquitaine. Il évoque le Gulf Stream, les tourbillons sous-marins, les migrations de plantes et d’animaux qui tracent des routes invisibles à travers les courants.
Chaque chapitre aborde une facette du vivant : les bâteaux choisis un par siècle racontent la conquête, la découverte, le commerce et les rêves humains. Des photos aériennes sublimes alternent avec des poèmes, des cartes, des dessins de Marie Détrée, peintre officiel de la Marine. L’ensemble respire le grand large, dans un rythme court et cadencé, “comme une vague”, dit Fontainieu.
L’énigme des anguilles et la mémoire du monde
Le biologiste Dominique Chevillon y décrit avec passion le voyage hallucinant des anguilles : ces créatures qui, après avoir traversé plus de 7000 kilomètres sans se nourrir, quittent les rivières européennes pour rejoindre les Sargasses. Blanches, puis jaunes, enfin argentées à la maturité, leurs yeux s’agrandissent pour s’adapter aux profondeurs extrêmes. Leurs organes digestifs deviennent reproducteurs, ultime métamorphose avant la fin. Une trajectoire poétique et tragique à la fois, miroir de la fragilité du vivant.

Un océan, des mondes
L’Atlantique, rappelle le livre, n’est plus une simple mer entre continents. À l’heure du réchauffement climatique, il s’intègre dans une vision d’océan global, une respiration planétaire qui relie les destins humains et non humains. “Regarder vers l’Atlantique, c’est se confronter à la mouvance du monde”
L’ouvrage évoque aussi la mondialisation de l’alimentation née des grandes traversées, depuis Colomb jusqu’à nos jours. Les épices, les fruits, les plantes et les animaux ont circulé grâce aux routes maritimes, tissant une géographie intime de la mémoire et du goût.

Une esthétique du bleu
La mise en page, épurée et lumineuse, respire. Beaucoup de bleu, beaucoup d’air. Des textes courts, des images puissantes, un souffle constant. Comme l’explique le jeune contributeur Adrien Motel, “les navires sont comme de petits morceaux de l’océan” : à la fois fragments et témoins d’un mouvement plus vaste.

Un livre pour penser, rêver, transmettre
Atlantique cherche à donner envie de comprendre. À faire sentir le lien intime entre la mer et l’humain, à travers les sciences, la poésie, la cartographie ou la philosophie du mouvement.
Un ouvrage rare, né « sous une bonne étoile », qui réussit à faire dialoguer érudition et émerveillement.
📘 Atlantique – Le grand livre de l’Océan
Sous la direction d’Emmanuel de Fontainieu
Éditions Sud Ouest – 2025
Textes d’Érik Orsenna, Olivier Poivre d’Arvor, Dominique Chevillon, Adrien Motel, Jean-Didier Urbain, et une vingtaine d’autres contributeurs.
Illustrations de Marie Détrée, peintre officiel de la Marine.
Un hommage polyphonique à ce personnage immense qu’est l’Océan.


